| Oublié ?

La Lettre

Focus

Les chefs d’établissement accumulent les motifs d’exaspération

Même si les questions de sécurité qui hantent la rentrée ne se posaient pas, les chefs d’établissement, d’après leur principal syndicat, supportent de moins en moins un mode de gestion qu’ils jugent descendant et tatillon. Ils rêvent parfois de «  mettre tout en off  »


Comment vont les chefs d’établissement ? Bien et pas bien. Bien parce qu’ils n’ont pas trop le choix, en cette rentrée marquée par une avalanche de consignes sécuritaires dont l’efficacité n’est pas d’une grande évidence mais qu’ils ont la charge d’appliquer, essentiellement avec les moyens du bord. Ce qui explique - mais en partie seulement - leur humeur de rentrée.
Le 8 septembre, leur syndicat majoritaire (deux tiers des voix aux élections professionnelles), le SNPDEN-UNSA (Syndicat national des personnels de direction de l’éducation nationale) a rendu compte de sa traditionnelle enquête de rentrée. Philippe Tournier, son secrétaire général, a passé en revue les points positifs et les sujets de préoccupation. De cet exposé exhaustif émergent au moins quelques constats paisibles. La rentrée s’est bien passée, pas de problème majeur à signaler. Sur la mise en place de la réforme du collège, l’enquête du syndicat évalue à 25% la proportion d’établissements où cela se passe « bien », avec des « professeurs favorables », et à 51% là où cela passe « plutôt bien », avec des professeurs qui « ont fini par accepter » cette réforme. Il y a aussi, à hauteur de 22% selon l’enquête, des collèges où la réforme est « bien » appliquée aussi, mais avec « des professeurs toujours hostiles ». Enfin (les chiffres précédents étant arrondis), il n’y aurait qu’une frange de 1,5% d’établissements où les choses se passent « mal, avec des professeurs toujours hostiles ».
Sans prétendre à l’objectivité scientifique, ces données sont tout de même recueillies auprès de 2 368 collèges sur les quelque 5 300 collèges publics. Après ce constat, affleure la critique, qui n’est pas toujours en phase avec la maison mère syndicale, l’UNSA. Pour Philippe Tournier, « c’est peut-être la dernière réforme classique », qui « part du centre » pour aller vers la classe. « Une méthode que l’on met en place depuis trente ans sans résultat », dit-il, espérant le passage « d’une culture de la réforme à une culture du changement ». M. Tournier n’a pas résisté à conter une anecdote : un recteur aurait réuni les personnels de direction de son académie pour leur présenter le discours de rentrée de la ministre dont il avait surligné les passages importants...
Concernant la sécurité, les chefs d’établissement sont très remontés devant certaines « questions sans réponse » adressées au ministère. Que faire des attroupements aux portes des lycées ? Le SNPDEN continue de réclamer qu’une dérogation provisoire à la loi Evin permette aux fumeurs de rester dans l’enceinte de leur établissement, et va saisir les groupes parlementaires à ce sujet. Autre point sensible : l’injonction de « sécuriser » les locaux mais sans aucun personnel un tant soit peu formé à la sécurité.
Même si ces questions n’existaient pas, les chefs d’établissement auraient bien des motifs d’exaspération devant une foule de mesures qu’ils jugent aussi tatillonnes que « hors-sol », au moins dans leur mode d’application, depuis le raccourcissement de la pause méridienne jusqu’à la suppression du redoublement en passant par le droit donné aux redoublants de terminale de rester dans leur lycée. Non que le syndicat soit hostile à ces mesures, mais c’est toujours la vieille méthode « descendante » qui passe de moins en moins. Même constat pour les applications informatiques  : « Nous passons notre temps à alimenter des bases de données impraticables », a dit un participant à la conférence de presse. Ce qui fait songer au syndicat à l’éventualité de « mettre tout en off ».