Jacques Grosperrin est député (UMP) du Doubs.
Vous avez remis au Parlement, en avril 2010, un rapport sur la mise en œuvre du socle commun de connaissances et de compétences, prévu dans la loi Fillon de 2005. Cinq ans plus tard, pourquoi le socle « se fait-il encore attendre » au collège ?
Le socle commun n’a été porté ni par les ministres successifs ni par les inspecteurs généraux de l’éducation nationale, qui sont très attachés à leur discipline et pour qui le socle représente une autre manière de travailler. Les enseignants ont reçu des directives ministérielles sans aucune formation ni accompagnement. Enfin, le Haut Conseil de l’éducation aurait dû évaluer la mise en place du socle trois ans après la loi Fillon. En 2009, rien n’avait été fait. C’est la raison pour laquelle certains députés et moi-même avons décidé de prendre les choses en main.
Le collège est-il le grand corps malade de l’éducation nationale ?
Le collège reste oublié, puisqu’il n’a pas été réformé depuis la loi Haby de 1975 qui instaure le collège unique ! C’est le maillon intermédiaire et manquant de l’éducation nationale. L’enquête PISA de 2006 a montré que près de 10 % des élèves français étaient en grande difficulté. C’est cette tranche d’échec scolaire que l’on n’arrive pas à réduire, et qui se prolonge par un classement de nos élèves en dessous de la moyenne de l’OCDE.
Peut-on réformer le collège en supprimant des postes et des moyens ?
Sortons de cette logique de moyens. Il y a suffisamment de moyens dans l’éducation nationale, mais ceux-ci ne sont pas utilisés comme il le faut. La clef de la réforme, c’est de faire du cousu main.
A quoi ressemblerait ce que vous nommez une « école du socle commun » ?
L’école du socle associerait un collège à une dizaine d’écoles primaires. Le chef d’établissement dirigerait tout l’enseignement obligatoire, du CP à la 3e, et les directeurs d’école seraient ses adjoints pédagogiques et administratifs. C’est cette mise en réseaux des écoles et des collèges, à l’image des réseaux « ambition réussite », qui permettrait un meilleur fonctionnement du système. Dans cette organisation, il n’y aurait plus de problèmes de remplacement, puisque les professeurs des écoles viendraient enseigner au collège, et inversement. Le temps de présence des enseignants dans le 2nd degré serait accru, non pas en augmentant leurs heures de cours, mais en incluant, dans leur mission, des tâches nouvelles, liées à la coordination, aux travaux en petits groupes, au tutorat, etc. La rupture entre le 1er et le 2nd degré serait effacée. L’école du socle privilégierait le travail en équipe, la pédagogie différenciée, la bivalence. Elle suppose une évaluation basée sur l’attestation des compétences requises et la suppression du brevet.
Cette organisation nécessite-t-elle d’accroître l’autonomie des établissements ?
A terme, il faudra accorder aux chefs d’établissement des marges de manœuvre leur permettant de moduler leur grille horaire et de recruter une partie de leurs personnels, afin de s’adapter au mieux aux besoins de leurs élèves. Le principal obstacle à l’autonomie tient à ce que notre système ne connaisse que des incitations individuelles. Les incitations collectives, en contrepartie d’obligation de résultats, stimuleraient les établissements.
La mise en place du socle est-elle portée par l’actuel ministre de l’éducation nationale ?
J’ai été ravi de constater que l’évaluation par compétences est l’un des cinq changements de la rentrée annoncés par le ministre. Luc Chatel est le seul ministre qui soit revenu sur la loi Fillon. Son directeur de l’enseignement scolaire, Jean-Michel Blanquer, est une personne « iconoclaste », qui a multiplié les expérimentations dans l’académie de Créteil lorsqu’il en était le recteur. Je pense que ce duo fonctionne bien ! Notre rapport semble avoir impulsé une certaine dynamique, y compris à l’Assemblée nationale. Pendant longtemps, les questions éducatives étaient noyées au sein d’une « commission parlementaire aux affaires sociales, familiales et éducatives ». En septembre 2009, cette commission a été scindée en deux. Il existe désormais une commission propre aux « affaires culturelles et de l’éducation ». Les députés ont enfin pris conscience du fait que l’éducation est fondamentale.
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